portrait de marx illustrant l'article travail productif et improductif

Travail productif et Capitalisme

« Travail productif et improductif » est le titre d’un paragraphe du Chapitre VI (inédit) du Livre I du Capital de Karl Marx. Il offre une vue critique d’ensemble du mode de production capitaliste.

Travail productif et Survaleur

La production capitaliste a pour but de produire de la survaleur. Du point de vue capitaliste, seul est productif le travail qui est consommé dans un procès de production qui permet de générer de la survaleur. Par conséquent, les seuls travailleurs et travailleuses qu’il tient pour productifs sont ceux et celles qui exercent leurs capacités de travail à produire cette survaleur.

En revanche, selon un point de vue plus général, le travail peut nous apparaître comme productif dans la seule mesure où il se réalise dans un produit ou une marchandise. Une personne confectionne un gâteau ou fabrique une chaise. La conception capitaliste est donc plus précise que le point de vue général. Le travail productif est uniquement celui qui valorise le capital, c’est-à-dire celui qui résulte dans un accroissement supplémentaire de marchandises pour celui qui détient les moyens de production.

Le travail productif pose donc le capital variable. C’est par le travail productif que le capital potentiel (la mise de départ en argent, en machines…) devient capital réel. Sans travail producteur de survaleur, la mise de départ demeure à l’état de somme d’argent, de machines inutilisées. Pour que cette mise se transmue en capital réel, il faut qu’elle entre dans un mouvement d’accroissement. C devient C’ = C+ΔC ; puis C’’= C’+ΔC’ … Aussi Marx donne-t-il une première définition du capital comme « valeur en procès ». Le capital c’est de la valeur qui se conserve et qui s’accroît.

Dans le capitalisme, le procès de travail est un moyen pour le procès de valorisation du capital. Cela est rendu possible parce que la survaleur (ΔC) correspond à du travail impayé. Concrètement, la mise en œuvre de la force de travail doit produire plus de valeur que sa propre valeur. Le détenteur de moyens de production acquiert de la force ou de la capacité de travail à un certain prix. Il l’utilise pour produire une valeur marchande (sous forme de produits ou de services) qui est supérieure à la valeur à laquelle il l’a achetée. La survaleur c’est donc la différence entre la valeur de la force de travail et la valeur produite par le travail effectif.

Sur le mode capitaliste

Les apologistes du système capitaliste présentent les travailleuses et les travailleurs salariés comme des personnes qui ne font qu’échanger leur travail contre de l’argent. Cette vision est mystificatrice. Les personnes salariées ne vendent pas leur travail mais leur capacité ou force de travail. La force de travail est payée à un prix inférieur à la valeur créée par leur travail effectif.

Lire aussi « Le salariat une institution anti-capitaliste« Une autre mystification consiste à présenter le travail comme un « coût de production ». Or, loin de constituer un « coût », le travail crée la valeur. Le travail impayé qui forme le surtravail génère la survaleur qui permet l’accroissement du capital.

Le procès de travail capitaliste présente les mêmes déterminations que le procès de travail en général. Il engendre des produits et des marchandises. Mais pour le capitaliste le procès de travail est avant tout le procès de valorisation du capital. Sa finalité ultime n’est pas déterminée par le contenu, l’utilité particulière ou la valeur d’usage des marchandises produites mais par la recherche de l’accroissement indéfini du capital.

Le procès de production capitaliste est un procès qui absorbe du travail impayé, qui fait des moyens de production des moyens de captation de travail impayé. Il en résulte, là aussi, que la détermination du travail productif n’a absolument rien à voir avec son contenu déterminé et avec son utilité particulière, mais seulement avec sa capacité de rendre une certaine quantité de valeur.

Lire aussi « Régime de retraite et démocratie« L’esprit borné du capitaliste prend pour absolue et « naturelle » la forme capitaliste de la production ainsi que sa vision du travail productif. Il en résulte qu’une activité de même nature est considérée comme productive si elle est exécutée pour valoriser l’argent d’un entrepreneur et improductive dans toutes autres situations. Soigner et enseigner les gens constituent du travail improductif, dans le cadre de l’hôpital et de l’école publique. En revanche, ces deux activités forment du travail productif, dans les cliniques et les écoles privées. De là, le discours capitaliste passe gaillardement de la qualification de « travail improductif » à celle de « coût » qui sert à légitimer les politiques de privatisation.

Le capital c’est de la valeur qui se conserve et qui s’accroît. Or c’est le travail qui rend possible ce mouvement de valorisation. C’est pourquoi Marx dit que le capital est avant tout un rapport social. C’est le rapport qui lient entre elles des personnes qui vendent leur capacité de travail à des personnes qui l’achètent afin de pouvoir s’accaparer la survaleur créée par le travail effectif.

Ce rapport social constitue la principale forme d’aliénation des individus, dans les sociétés capitalistes, dans la mesure où il s’impose objectivement à tous et se présente subjectivement comme une loi d’airain sur laquelle ils ne semblent pas avoir prise.

Gilles Sarter

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